Les contes d'Errüaleyram : Le Petit Chaperon rouge

           Il était une fois, dans un village nommé Thiercelieux, une gentille et jolie petite fille surnommée Le Petit Chaperon Rouge en raison de son chaperon confectionné par sa grand’mère. Cette petite fille fut célèbre pour avoir échappé à un loup-garou. Certains se demandèrent pourquoi, puisqu’elle avait été avalée tout rond par le loup-garou et que se fût un anonyme bûcheron qui les sauva, elle et sa vieille grand-mère.

            Cette petite fille grandit et embellit, et on ne l’appela plus«  Le Petit Chaperon Rouge », mais « Rubis », pour faire un peu plus adulte et parce qu’on avait oublié le vrai prénom de ladite Rubis. Fidèle à ce surnom, elle ne portait que du rouge et un chaperon de taille supérieur, l’ancien étant trop petit.

            Un jour -ou peut-être une nuit ?- le village découvrit le corps sans vie d’un des leurs. L’auteur du crime ne faisait aucun doute : un loup-garou ! Pourtant, la nuit dernière n’était pas une nuit de pleine lune – comme quoi les traditions se perdent. Le conseil se réunit et il fut décidé que la chasse au loup était ouverte. Chaque après-midi, le village élirait celui qu’il jugerait être un loup-garou.

            Le lendemain, une nouvelle victime. On chercha qui pouvait vouloir la mort du jeune garçon –car c’était un jeune garçon- : il en résulta que se fût sa vieille mère, avec qui le fils s’était disputé la veille, qui fût brûlée. Le Maître du village, qui n’avait le droit que de se taire, informa les villageois que c’était une honnête villageoise qui avait été tuée.

            Les habitants se couchèrent, tristes et effrayés. Au matin, une nouvelle victime : une petite fille ne représentant aucune menace. Avec son sang étaient écrits ces mots :

 

«  La curiosité est un défaut que ne pratiquera plus cette enfant »

 

La petite fille avait visiblement espionné le loup-garou afin de découvrir son identité.

            Le village se réunit. On décida de tuer celui ou celle qui semblait le ou la plus innocente. Le choix se porta sur la sœur de Rubis : Grenat. Rubis défendit chèrement sa sœur. On ne l’écouta pas et on tua Grenat.

Le Maître du village annonça que c’était une louve-garou. Le village se recoucha tranquille et serein, après une fête qui dura jusqu’à vingt-deux heures.. Le lendemain, un nouveau corps fût retrouvé. Celui qui, le premier, avait voulut tuer Grenat. Le village se tourna vers Rubis.

- Suis-je sotte au point de défendre ma sœur, en sachant qu’elle va quand même mourir par la suite, si je suis un loup-garou ? et de tuer la nuit même son assassin ? et puis, moi aussi je me suis fait avaler par un loup-garou !

Rubis avait toujours été considérée comme une brave jeune fille. On lui offrit des excuses et on tua sa mère, qui avait peut-être donné son don de loup-garou à sa fille aînée et défunte. Le Maître informa que les villageois venaient de tuer une honnête villageoise. Le village s’endormit.

            Personne ne mourut la nuit suivante. Le village savait que le loup rôdait toujours, mais que peut-être cette nuit, il avait bu trop de vin et ne s’était pas réveillé, ou bien une légende racontait qu’une sorcière pouvait sauver une victime. Par prudence, on tua une vieille dame un peu louche, que le Maître identifia comme la voyante du village, qui exerçait en secret.

            Le lendemain, trois autres victimes : un couple d’étrangers de passage dans la ville et le père de Rubis, maintenant seule au monde. Que d’honnêtes et bons villageois. La sorcière avait sans doute voulu essayer de tuer un loup-garou grâce à sa potion tue-loup –qui, notons le, tuait aussi bien les humains- sans succès. On fit rapidement le calcul des survivants.

Un boulanger, deux jeunes filles dont Rubis, un jeune homme, un bébé et ses parents, un bûcheron, un chasseur et un vieux monsieur tout rabougris. On tua ce dernier. La sorcière était donc un sorcier.

            Au petit jour, on retrouva le corps du chasseur agonisant. Dans un suprême effort, il fusilla le boulanger.

Il restait donc les deux filles, le jeune homme, le bûcheron le bébé et ses parents. Tous votèrent contre Rubis, la trouvant trop innocente et pénible de pleurer à chaque fois qu’un villageois mourait. La jeune fille fit tout pour se disculper, sans succès. Elle s’enfuit. Le reste du village –qui était plutôt un hameau, en fait- courut à sa poursuite.

            Rubis courait à perdre haleine. Elle s’enfonçait de plus en plus dans les bois, et la forêt devenait sombre. Rubis portait toujours un couteau dans une de ses bottes. Elle le sortit. Elle se demandait pourquoi les villageois, si gentils, avaient tous votés contre elle. Elle faillit jeter le couteau, par horreur sans doute, mais se ravisa. Elle était dans la jungle, et devait obéir à sa loi principale : chacun pour soi.

            Ce fut le père du bébé qui la trouva la première. Personne ne sût ce qui se passa alors. Rubis s’en sortie vivante, mais éprouvée. Des larmes ruisselaient sur ses joues. Pourquoi ce gentil père s’en était pris à elle ? Elle venait de rendre un enfant orphelin et le remord la torturait. Pour ne pas se laisser abattre, elle se remémorait cette phrase en boucle : « Chacun pour soi, chacun pour soi, chacun pour soi, … ».

            Tous les habitants du village disparurent un par un, sans doute dévorés par des loups ou perdus, nul ne le sût jamais.

            Rubis, de plus en plus mal en point, se retrouva nez à nez avec le dernier survivant du hameau : le bûcheron.

- Tu vas mourir, ma petite Rubis.

- Pourquoi me tueriez-vous ? Je vous ai toujours apprécié.

- Je dois venger tous les villageois, morts ces derniers jours.

- Comment savez-vous qu’ils sont morts ?

- J’ai entendu leurs hurlements d’agonie. Cela m’étonne que se soit toi, le loup-garou. Je t’ai toujours considéré comme ma propre fille.

- Vous allez tuer votre fille ? Je me battrais s’il le faut ; et qu’importe que vous soyez un loup-garou, ma lame est un argent.

Tout en parlant, le chasseur s’avançait et Rubis reculait. Elle se retrouva finalement acculée contre un arbre.

            Le bûcheron leva sa hache. Rubis fonça en avant, sa lame devant elle. Le bûcheron l’évita de justesse. Ils se battirent jusqu’au matin.

            Rubis sortit seule de la forêt. Elle souriait, d’hystérie probablement. Elle se mit à rire, un rire fou, découvrant de magnifiques canines. Elle hurla au soleil, tel un loup hurle à la lune.

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